En novembre 2018, la Commune du Vésinet avait lancé une procédure d’appel d’offres ouvert en vue de l’attribution d’un marché « d’entretien du patrimoine arboré et de diagnostic des arbres du domaine public et privé », divisé en quatre lots. Le lot n° 1 avait pour objet « l’entretien des arbres d’alignement ».
Par un courrier du 9 janvier 2019, la Commune informait la Société SAMU du rejet de son offre. Il lui était notamment reproché de ne pas prévoir de second passage 48h après la coupe de la taille en rideaux pour enlever les branchages tombés entre temps. Or, un tel grief était erroné car cette mention était bien prévue non spécifiquement au titre de la taille en rideau mais au titre de la taille architecturée.
Toute la difficulté consistait à démontrer que la taille en rideau était bien une sous-catégorie de la taille architecturée et qu’un tel motif ne pouvait que provenir d’une dénaturation de l’offre dudit candidat.
Depuis un arrêt de Société Veolia Eau du 24 octobre 2008 (n° 300034), le Conseil d’Etat a jugé, de manière constante, que le contrôle de la dénaturation d’une offre par le pouvoir adjudicateur relevait de la compétence du juge du référé précontractuel, et ce, en ce qu’un tel manquement portait atteinte au principe d’égalité de traitement entre les soumissionnaires à un appel d’offres (CE, 24 juin 2011, n° 347720, Société SANEF ; CE, 21 mai 2010, n° 333737, Commune d’Ajaccio).
La dénaturation désigne l’altération du contenu d’une offre par le pouvoir adjudicateur.
Si l’altération de l’offre d’un candidat est un moyen opérant, tel n’est pas le cas de l’erreur d’appréciation de l’acheteur sur le mérite de chaque offre.
Par un arrêt du 20 janvier 2016 (n° 394133), le Conseil d’Etat a précisé la notion de dénaturation :
« 2. Considérant qu’il n’appartient pas au juge du référé précontractuel, qui doit seulement se prononcer sur le respect, par le pouvoir adjudicateur, des obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation d’un contrat, de se prononcer sur l’appréciation portée sur la valeur d’une offre ou les mérites respectifs des différentes offres ; qu’il lui appartient, en revanche, lorsqu’il est saisi d’un moyen en ce sens, de vérifier que le pouvoir adjudicateur n’a pas dénaturé le contenu d’une offre en en méconnaissant ou en en altérant manifestement les termes et procédé ainsi à la sélection de l’attributaire du contrat en méconnaissance du principe fondamental d’égalité de traitement des candidats ; » (CE, 20 janvier 2016, n° 394133).
Il en résulte que la dénaturation de l’offre d’un candidat est la prise en compte d’éléments inexacts, absents de l’offre du soumissionnaire ou dépourvus de lien avec les exigences du marché par le pouvoir adjudicateur.
Par l’ordonnance de référés obtenue sur ce dossier, c’est la position adoptée par le Tribunal administratif de Versailles (TA Versailles, ord. réf., 15 février 2019, Société SAMU, n°1900632, Lexbase n°A9941YYT, Hebdo édition publique Edition n°536 du 14/03/2019, note Marie-Hélène Ansquer)
Le Tribunal a donc annulé la procédure au stade précédent l’analyse des offres et a enjoint à la commune de reprendre son analyse, cette fois exempte de dénaturation.