Face à la nécessité de conclure une délégation de service public, l’urgence ne saurait justifier, à elle-seule, qu’il soit fait abstraction des obligations de publicité et de mise en concurrence, par ailleurs lourdes quant à leur mise en oeuvre. C’est ce que vient de souligner le Conseil d’Etat, par un arrêt du 4 avril 2016. Il déclare : « en cas d’urgence résultant de l’impossibilité soudaine dans laquelle se trouve la personne publique, indépendamment de sa volonté, de continuer à faire assurer le service par son cocontractant ou de l’assurer elle-même, elle peut, lorsque l’exige un motif d’intérêt général tenant à la continuité du service public, conclure, à titre provisoire, un nouveau contrat de délégation de service public sans respecter au préalable les règles de publicité prescrites ; que la durée de ce contrat ne saurait excéder celle requise pour mettre en oeuvre une procédure de publicité et de mise en concurrence, si la collectivité entend poursuivre la délégation du service, ou, au cas contraire, pour organiser les conditions de sa reprise en régie ou pour en redéfinir la consistance » (CE, 4 avril 2016, Communauté d’agglomération du centre de la Martinique, n°396191).
Dans ce même arrêt, le Conseil d’Etat juge que, dans les faits de l’espèce, de telles conditions n’étaient pas remplies, dans la mesure où le contrat de gestion et d’exploitation de la fourrière de véhicules de Mangot Vulcin qui avait été conclu avec le précédent prestataire aurait pu être poursuivi, sans que soit justifié l’urgence à conclure un contrat avec un nouveau prestataire.
Le Conseil d’Etat adopte donc une position classique accordant une souplesse de gestion aux personnes publiques en cas d’urgence, tout en rappelant que ne relève pas de l’urgence n’importe quelle situation d’imprévision, mais seulement des situations exigeant la réunion des conditions suivantes :
– une impossibilité soudaine
– indépendante de la volonté de la personne publique
– un motif d’intérêt général tenant à la continuité du service public
Par ailleurs, le contrat conclu en urgence ne le sera :
– qu’à titre provisoire
– que pour une durée n’excédant pas celle requise pour mettre en oeuvre une procédure de publicité et de mise en concurrence ou organiser les conditions de sa reprise en régie.
Cet arrêt s’inscrit dans un raisonnement analogue à celui adopté par la haute juridiction en matière de recours à certains marchés publics passés selon la procédure négociée.